mardi 4 avril 2017

Baise-moi, Virginie Despentes

Cela fait déjà un long moment que je n'ai pas lu de Despentes. Le dernier était son recueil de nouvelles lu en 2015, pour dire. Un recueil qui d'ailleurs ne m'avait pas tant plu que ça. Cette fois, elle revient dans la PAL avec son tout premier roman. Ce qui veut enfin dire que je vais pouvoir m'offrir bientôt les Vernon Subutex.

Baise-moi, Virginie Despentes

Editeur : Le livre de poche
Collection : /
Année de parution : 2016 pour cette édition
Nombre de pages : 288

A lire si :
- Vous aimez le style Despentes
- Vous voulez du bien trash, bien vulgaire, bien sanglant aussi.

A ne pas lire si : 
- Vous n'aimez pas le trash, le vulgaire, le violent

Présentation de l'éditeur : 

« Elle est surprise d'être aussi vulnérable, encore capable de douleur. Au début, on croit mourir à chaque blessure. On met un point d'honneur à souffrir tout son soûl. Et puis on s habitue à endurer n'importe quoi et à survivre à tout prix. On se croit endurcie, souillée de bout en bout. L âme en acier trempé. » Nadine et Manu sont deux filles de leur époque, à une nuance près elles refusent de subir la vie, ses frustrations et ses défaites. Alors, elles forcent le destin à accomplir leur volonté, persuadées que tout ce qui ne les tuera pas les rendra plus fortes. De casses de supermarché en revanches sanglantes, elles deviennent des prédatrices insatiables et sans scrupules, parsemant leur sale balade de sentences bien brutales, syncopées et implacables.

Mon avis

Baise-moi se traîne depuis sa parution une réputation particulièrement sulfurique, réputation qui ne fut pas arrangée par le film tiré du roman, qui fut censuré en France. Premier roman de Despentes, premier succès aussi même s'il a bien failli ne jamais être publié. Et premier scandale avec le film. Mais qu'a donc ce livre pour avoir cette réputation ? 

Le premier chapitre donne le ton. On découvre Nadine, l'une des deux héroïnes du roman, en train de mater un porno puis de se prendre la tête avec sa coloc'. Ensuite, passage chez Manu, la seconde, complète saoule. Durant la première partie, nous allons apprendre à la connaitre. L'une est fan de porno, prostituée lorsqu'elle a besoin de tunes, mal dans sa peau. L'autre est une banlieusarde qui n'a plus grand chose à perdre, si ce n'est elle-même dans la violence et dans l'alcool. Et puis, ça bascule. Violée puis assistant au meurtre de la fille avec qui elle traînait à ce moment-là, Manu pète un câble. Elle va braquer son mec, lui prendre flingue et argent puis allait assassiner un flic et sa femme. Nadine, elle, va rejoindre un pote sur Paris, pote qui se fera tuer juste après son arrivée. Et c'est à ce moment qu'elles vont se rencontrer. Rien ne justifie leur amitié soudaine dans les premiers chapitres. Du moins presque rien. Elles n'ont rien en commun si ce n'est leur désillusion. Et pourtant, alors que Manu prend presque en otage Nadine pour la mener loin de cette merde, elles vont se lier d'amitié. Et toutes les deux vont semer panique et mort autour d'elle. Pourquoi ? Vengeance face aux injustices faites aux femmes, envie de le faire aussi, juste pour le plaisir, juste pour prouver qu'elles peuvent. Commence alors un road-trip sanglant pour elles deux, où elles mêleront sexe et violence jusqu'au bout.

L'écriture de Despentes est à ses débuts et elle est déjà forte de cette oralité qui a fait sa marque. de cette vulgarité aussi. Tout comme la violence. Celle de la condition de Manu et Nadine, celle de leurs gestes, de leurs relations à l'homme, à ce qui les entoure. Et les certains des thèmes qui deviendront une marque de l'autrice montre déjà le bout de leur nez. Et pourtant, Baise-moi semble plus faire parler de lui à cause des ses scènes de sexe (écrites de manière crues) et sa violence presque gratuite. Il est vrai que comme dans les autres livres de Despentes, tout cela est bien présent. Mais on en oublie cette part de féminisme qui commence à naître chez elle, on oublie la dénonciation des classes sociales, on oublie beaucoup de chose sur ce livre à cause de sa vulgarité voulue et qui va si bien à ses personnages. Après, il est vrai que j'ai lu King Kong Theory, ce que personne n'avait pu faire à l'époque puisqu'il n'avait pas été écrit. J'ai un peu de recul sur l'autrice, je "connais" un peu sa vie. Le personnage de Manu semble découler en ligne droite du viol de Despentes, celui de Nadine rappelle l'autrice lorsqu'elle-même se prostituait. 

Après, le roman a des défauts, il faut bien le dire. L'histoire va trop vite, certains passages semblent n'être là que pour combler, les personnages, même Nadine et Manu manquent parfois de profondeur, surtout les secondaires qui finalement ne sont quasi pas traiter. Parfois, ça va bien trop vite, parfois, ça va bien trop lentement pour des scènes qui n'apportent pas plus que ça à l'histoire. 

J'ai mis longtemps à lire Baise-moi. Très longtemps. Parce que j'avais peur d'y trouver tout ce que je n'aime pas forcément chez son autrice (Les Chiennes Savantes avaient été une déception pour moi). Et en fait, j'y ai trouvé beaucoup de choses qui m'ont parlé. Alors, oui, c'est surement le plus vulgaire, trash,violent,  à la limite du porno qu'elle a écrit. C'est aussi celui où on la retrouve le plus, il me semble. Et même si parfois, j'ai eu cette sensation de malaise à la lecture de certains passages (et aussi une impression de voyeurisme déjà notée dans les autres romans d'ailleurs), le livre ne m'a pas du tout laisser indifférente. Le discours féministe de Despentes est déjà là, dans ses personnages, dans ce qu'elle leur fait vivre. Si l'on dépasse le trash du livre, si on lit entre les lignes, Baise-moi est une sorte d'hommage à la femme qui combat pour être ce qu'elle veut et non pas ce que l'homme veut. 

PS : rien à voir avec le contenu, mais j'aime vraiment vraiment beaucoup cette couverture, beaucoup plus que l'originale (qui montre l'un des meurtres les plus sordides du livre d'ailleurs)

1 commentaire:

  1. Salut ! Je viens de lire et de chroniquer ce roman, qui est une découverte du monde de Despentes pour moi. Effectivement, à côté du trash, on oublie qu'elle parle aussi des classes sociales et du racisme. Le trash n'est pas du tout ma tasse de thé, mais j'ai bien envie de découvrir ses autres textes !

    RépondreSupprimer