mardi 21 janvier 2014

Punk's Not Dead, Anthelme Hauchecorne

J'ai pris ce livre après avoir lu la chronique de Dup sur Book en stock et aussi parce qu'entre le nom et la couverture, j'étais sure que ça allait me plaire. Et effectivement, ce Cercueil de nouvelles, comme le nomme son auteur m'a beaucoup plus.

Punk's Not Dead, Anthelme Hauchecorne

Editeur : Midgard
Collection : /
Année de parution : 2013
Nombre de pages : 456

A lire si :
- Vous voulez des thèmes punks
- Vous aimez l'humour
- Vous voulez une belle écriture

A ne pas lire si :
- Vous ne voulez pas de thème sombre
- Vous voulez un roman

Présentation de l'éditeur : 

À quoi l’Apocalypse ressemblerait-elle, contée par un punk zombi ? Qu’adviendrait-il si le QI des Français se trouvait d’un coup démultiplié ? Un grand sursaut ? Une nouvelle Révolution, l’an 1789version 2.0 ?
Est-il bien sage pour un succube de s’amouracher d’un simple mortel ?
Les gentlemen du futur pourront-ils régler leurs querelles au disrupteur à vapeur, sans manquer aux règles de l’étiquette ?
Et si La Mort s’accordait un repos mérité ?
Treize nouvelles. Autant de sujets graves, traités entre ces pages avec sérieux.
Ne laissez pas vos neurones s’étioler, offrez une cure de jouvence à vos zygomatiques. Cessez de résister, accordez-vous une douce violence…
De toute évidence, ce recueil a été écrit pour vous.

Mon avis

Avant de parler du contenu, parlons un peu du contenant. Si l'illustration de couverture mise par ici semble bien terne et sombre, ce n'est pas le cas en vrai. Le personnage est en surbrillance, les ombres et les lumières magnifiques. Nous devons cela à Loïc Canavaggia, qui non content de faire la couverture, a aussi illustré les nouvelles de ce recueil. Et les dites illustrations, en parfaite adéquation avec les nouvelles sont tous aussi belles que la couverture. En témoigne la première que je vous met dans l'article. De plus, chaque "chapitre" des nouvelles est séparés du précédent par de petits dessin tout autant travaillé.

Passons maintenant au contenu. D'abord dans son ensemble. L'écriture d'Anthelme Hauchecorne m'a beaucoup plus. C'est un savant mélange qu'il nous livre, entre poésie et horreur. Il écrit de manière poignante, touchante des thèmes durs. J'ai beaucoup apprécié cette manière qu'il a d'écrire, dans un style qui pourrait paraitre un peu vieillot parfois mais qui donne sa force à ses textes.

Et puis, comme souvent lorsque j'y est droit dans un recueil, j'ai apprécié avoir la genèse des nouvelles, le pourquoi du comment. Et même là, l'auteur nous montre à quel point il maitrise son style et son écriture. Même ces parties sont belles.

Passons à présent aux nouvelles elles-mêmes. Elles sont treize en tout. Treize nouvelles différentes les unes des autres mais avec un thème commun, le punk, sa mythologie mais aussi cette envie de liberté qui le dépend si bien.

Decembre aux cendres :
Première nouvelle et aussi gros coup de cœur pour moi. Nous voilà dans une Budapest dévastée, à suivre la jeune Eva. Pour pouvoir aider sa mère malade, elle va devenir scorpailleuse. Mais dans les ruines de Budapest, rien n'est facile et beaucoup de secrets se cachent. Cette nouvelle nous plonge directement dans ce que va être le recueil. Elle est sombre, très sombre, elle est triste aussi. En quelques pages, nous sommes plongés dans une terre d'apocalypse à la suite d'une enfant qui va devoir grandir bien trop vite. L'espoir grandit pourtant tout au long de la nouvelle, jusqu'à l'évènement qui semble tout bouleversé. Pourtant, quelque part, l'espoir survit. J'ai vraiment été touché par Décembre aux cendres.

Sarabande Mécanique
Moi qui aime le Steampunk, j'ai été servie dans cette nouvelle. Nous voilà spectateur d'un étrange duel au disrupteur à vapeur dans une colonie spatiale Anglaise. J'y ai trouvé l'humour typique british qui va parfaitement avec le thème. De plus, la nouvelle est pleine d'énergie, de vie, de rebondissement et sa chute est, je trouve, parfaite.

No future
L'apocalypse a eu lieu. Le monde est mort. Nous voilà à le découvrir par les yeux d'un punk Zombie. Voilà une nouvelle pour le moins intéressante sortant des sentiers battus du post-apo zombie. Pas de mélodrame, de pleurs ou de "si nous avions fait ça autrement...". Johnny Roten nous raconte sa façon de voir ce qu'il se passe suite à l'apocalypse de manière très rock. J'ai d'ailleurs apprécié la manière dont il le fait, avec tout plein de reférence à la musique punk. La nouvelle fonctionne du coup parfaitement.

C.F.D.T.
Avec un nom pareil, je me suis demandée ce que j'allais pouvoir lire. C.F.D.T. est un texte hilarant, reprenant les classiques de la fantasy pour mieux les détourner. Et cela fonctionne parfaitement, faisant de cette nouvelle la plus marrante du recueil. 

Sale petite peste !
Celle-là ne pouvait que me plaire. Elle met en scène la Mort, celle de Pratchett. Au début, j'ai eu un peu peur de ne pas apprécier. J'aime la Mort chez Sir Terry Pratchett, je ne savais pas si j'allais l'aimer écrite par une autre personne. Et en fait, Anthelme Hauchecorne reprend tout ce que j'aime du personnage tout en ce l'appropriant parfaitement. Ici, nous avons donc une Mort stressé, surmené, à l'aube de la dépression. J'ai retrouvé un humour à la Pratchett mais pas que. Je dis un grand bravo à l'auteur pour ça d'ailleurs. Il a vraiment su faire de ce personnage SA Mort et non une vulgaire reprise de celle de Pratchett.

Les Gentlemen à Manivelle
Une nouvelle SF encore une fois. Ici, nous découvrons un monde où l'humain est assisté par des machines pour tout et n'importe quoi. A tel point que finalement, l'homme devient paresseux et surtout dépendant des robots. Je pense qu'il s'agit ici de la nouvelle la plus classique du recueil, parce que le thème homme/machine est très souvent abordé. Pourtant, elle reste original par son mordant et son humour. Elle n'est pas pour moi la plus marquante du recueil.

La Guerre des Gaules
Cette nouvelle est présentée sous forme d'interview pour un documentaire suite à la fameuse Guerre des Gaules. Nous découvrons donc une France qui suite à l’élection du partie National Français plonge dans le chaos le plus total, se morcèle en régions autonome, pour ensuite revenir petit à petit sur le devant de la scène grâce au Darwinisme, qui a permit à beaucoup de Français de voir leur QI augmenté. C'est une nouvelle particulièrement engagée, qui donne pas mal à réfléchir sur certains points de la politique actuelle. Sa narration et surtout les divers éléments qu'elle met en avant en font une nouvelle très forte.

Voodoo Dolls
Comme pour Gentlemen à Manivelle, cette nouvelle est assez conventionnelle. Elle nous entraine à la suite d'un privé dans les bas-fond Lyonnais. Ce qui en fait son originalité reste l'origine du dit privé et la culture vaudou qui berce le texte. Par contre, j'ai été un peu déçue de la chute, trop prévisible. C'est dommage, elle reste tout de même une bonne nouvelle servie par une écriture magnifique.

De profondis
 Pour survivre, les dragons se sont cachés dans les océans, mutant leurs corps pour survivre dans les abysses. Pourtant une nouvelle menace vient troubler leur quiétude. Plusieurs petits dragons ont disparu, l'enquête commence. J'ai apprécié cette nouvelle à la fin peut-être trop prévisible. L'univers y est complexe, on sent que l'auteur s'est vraiment documenté avant d'écrire, du coup, tout semble particulièrement vraie. On trouve aussi une pointe d'écologie (d'ailleurs, la nouvelle est dédiée aux membres de Sea Shepherd, un organisme militant pour la survie des océans), un constant déplaisant sur ce qu'il se passe sous la surface de l'eau à cause de l'humanité. Bref, une nouvelle des plus interessante et surtout fascinante

La Ballade D'abrahel
Cette histoire est tiré d'un vieux conte Lorrain. Ici, nous suivons Abrahel, succube de son état, à la recherche d’âmes pour acheter un collier qui lui a appartenu. J'ai apprécié la mythologie de l'histoire, qui met en scène la Chute des Anges en Enfers à la suite de Lucifer. J'ai aussi aimé le personnage d'Abrahel, ange déchue qui a tendance à aimer les humains (ça change un peu de ce que l'on lit d'habitude). C'est parfaitement mené, très plaisant à lire et l'histoire sort des sentiers battus (ainsi que du conte originel que l'on retrouve d'ailleurs à la suite).

Le Buto Atomique
Encore une nouvelle écologique, dénonçant le nucléaire cette fois. Un patient conte à son médecin comment il a guéri mais surtout ce qu'il s'est réellement passé le jour où il a été atteints de son empoissonnement. J'ai aimé le thème, le fait que la sorcière use de la danse pour jeter son sort. J'ai aimé l'écriture parfaite mettant la danse en valeur. Par contre, j'ai moins aimé la nouvelle. Va savoir pourquoi. Peut-être parce qu'il manquait une touche de merveilleux, un peu plus d'espoir. Peut-être parce que je n'ai pas non plus aimé le narrateur. C'est dommage, parce que cette nouvelle, stylistiquement, avait tout pour plaire.

La grâce du Funambule.
Voilà la seule nouvelle qui ne fait pas partie de la SFFF du recueil. Cela ne lui enlève rien, elle est tout aussi bonne que les autres. D'ailleurs, elle m'a particulièrement touché. Nous suivons un jeune homme, homosexuel (c'est important pour le reste de la nouvelle), dans le Roubaix de la mode. Il vit pour son rêve, marchant sur la corde raide dans tous les domaines pour arriver à ses fins. C'est un homme perdu finalement que nous suivons. Perdu dans son monde. C'est une nouvelle touchante, mais aussi désabusée et très sombre. C'est aussi une nouvelle contre l'homophobie, la peur de l'inconnu. Elle fonctionne parfaitement et même si elle fait partie de la littérature blanche, elle a parfaitement sa place ici.

Le roi d'Automne
Dernière nouvelle du recueil, la plus longue aussi. Ceux qui ont lu le premier tome du Sidh, série de l'auteur, ne seront pas perdu. Ceux qui ne l'ont pas lu, comme moi, ne le seront pas non plus. L'auteur nous décrit le monde de la nouvelle au fur et à mesure, nous permettant de le découvrir en même temps que ses personnages. Nous voilà donc à parcourir l'En-deçà en même temps que les deux protagonistes durant une quête initiatique leur permettant de passer à l'âge adulte. L'intrigue y est développée à l’extrême et surtout complexe. L'univers est tout aussi détaillé, sombre et mystérieux. On se laisse prendre par l'histoire qu'on dévore en un tour de main. A la fin de ma lecture, je n'avais plus qu'une envie (que j'ai toujours), lire le Sidh.

En conclusion, voilà un recueil que je recommande vraiment, à l'écriture parfaitement maitrisé et aux thèmes bien traités. Malgré la noirceur qui peut en ressortir, on y trouve beaucoup d'espoir, d'humour aussi. C'est cynique, mordant. L'auteur nous emporte dans son univers de manière plaisante, pas du tout déprimante. J'ai passé un agréable moment à le lire, même si certaines nouvelles m'ont un peu moins plus. Chose de sure, je vais continuer ma découverte des écrits de l'auteur.

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